PROFONDEURCHAMPS

Aïda s’égosilla à Doha et le charme opéra… enfin presque

Doha dans l’oeil (épisode 1)

Au départ, c’était plutôt une bonne idée de jouer Aïda à Doha. Ne crachons pas dans la soupe, même si, vous le comprendrez assez vite, elle manquait un peu de saveur. Alors que des légumes – des gros – il n’en manquait pas dans l’assistance.

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L’opéra se jouait en extérieur. Ce qui présente deux inconvénients majeurs. Le premier c’est qu’il fait encore chaud. En conséquence, plus le temps passe, moins vous appréciez Verdi et plus vous pensez à la canette de Coca light que vous allez vous taper à l’entracte. Le deuxième inconvénient, c’est la proximité de l’aéroport. Quand l’avion de Qatar Airways survolait l’amphithéâtre, on n’entendait plus rien, exception faite des glorieuses et fameuses trompettes du deuxième acte.

Il faut signaler les hilarantes traductions en anglais. Quand Aïda disait en italien « je veux fuir avec toi », la traduction anglaise était « je veux m’envoler avec toi ». Sans doute la proximité de l’aéroport.
J’avais un voisin très inspiré. Il m’a confié qu’il était persuadé que Memphis était aux USA, et non en Egypte. Véridique.

Les danseuses étaient « à poil-oui-mais-non ». Elles portaient une tunique couleur peau qui donnaient l’illusion de leur nudité. Cela sembla suffire au bonheur des Qataris qui restèrent jusqu’à la fin du pudique ballet, c’est à dire au terme du deuxième acte. Bel effort les gars.

Au moment où Aïda, face à son père, était confrontée au plus grand dilemme de sa vie, une odeur persistante de brochettes, venue des restaurants adjacents, envahit l’amphithéâtre. Dès lors le dilemme du public fut le suivant : est-ce que je me prends un sandwich à la fin du deuxième acte ou est-ce que je me fais un petit kebab sur le tard ?

Je ne suis pas certain que le public des qataris ait compris le caractère irrévérencieux – pour eux – de cet opéra. Tout de même, on a des éphèbes en pagnes qui clament leur amour d’Isis. Et une esclave – aujourd’hui ce serait une maid – qui s’entiche d’un prince. Ça prête à réflexion.

Quoi qu’il en soit, ce n’est pas demain qu’on entendra l’air du catalogue de Don Giovanni et sa fameuse tirade « en Italie, j’en ai niqué 640, en Allemagne 231, 100 en France, 91 en Turquie, mais en Espagne déjà 1003 ».
Finissons sur une note positive. Les spectateurs applaudissaient tout le temps. Ils sont donc prêts pour la coupe du monde de 2022.

Fatima Yalla