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Mesma Records : « Chaque track est pour moi davantage une sculpture qu’un morceau traditionnel »

Etudiant en art à la Parsons de New York, Gabriel Mester alias Gabor est co-fondateur, avec Marc-Antoine Rousseau du label Mesma Records. En construction depuis 1 an et demi, moment où le label a pris son véritable départ, Mesma Records compte déjà parmi ses artistes Roof rac et Pohl Zar. Deux choix qui représentent l’envie du label, né de la culture électronique, d’en faire une musique autonome.

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Comment as-tu commencé à faire de la musique ?

J’ai toujours fait de la musique, d’abord au conservatoire puis, en grandissant, c’est devenu quelque chose de complètement addictif. J’ai fait la découverte de la sensation physique de la musique qui te prend aux tripes et devient une obsession. J’adore la musique électronique mais celle que je préfère, c’est la musique qui revient à des sons plus organiques. Tu entends l’objet, la texture, l’accident. Je travaille sur cette dualité entre la musique dansante et l’effet musical. On part d’une musique que beaucoup de gens n’écoutent que dans les soirées et nous voulons en faire quelque chose d’à part entière.

Quel a été le point de départ de l’aventure Mesma Records ?

Tout a commencé quand j’ai rencontré Marc-Antoine Rousseau, cette passion commune nous lie. Il était en quelque sorte le « copain ipod » en soirée (rires). Les initiales de Mesma Records sont une contraction de mon nom de famille (Mester) et du prénom de Marc-Antoine. A force de tripatouiller des mots, celui-ci est resté. Nous avons eu l’envie de fonder un label en nous disant que ce serait notre patrimoine culturel dans 10 ans. On pourra se dire : « on à réussi à faire ça » ! Pour avoir un statut plus officiel, nous avons d’abord créé une association, puis élaboré le label au niveau visuel.
Comment pourrais-tu définir le genre de musique que vous proposez ?

C’est une musique électronique influencée par toutes les musiques dansantes (surtout house). Mais avec cette volonté d’en faire plus une musique de salon. La pulsation rythmique dansante (124 Bpm) est à la fois un support qui fait que la musique est accessible (elle fait danser), mais je la vois plus comme une contrainte artistique pour créer une sorte de sculpture musicale. Quand je fais de la musique, je vois plus le produit fini comme une sculpture qu’un morceau traditionnel. J’aime malaxer les textures et les matières.

Avec quels artistes avez-vous déjà collaboré ?

Nous avons signés deux artistes pour le moment. Le premier, Roof rac travaille sur un vinyle à venir. Avec lui, on pourrait basculer dans le hip/hop. Ce qui montre encore plus notre volonté de sortir de la musique dance. Nous avons fait une autre belle rencontre grâce au label, avec Pohl Zar. C’est un pianiste qui est complètement dans le jazz et la house. On a pu monter ce projet de live (tous les deux) plus innovant et vivant que ce que les gens ont l’habitude de voir dans ce cadre de soirées. Nous avons aussi organisés deux performances avec la chanteuse Aude qui produit également de la musique électronique.
Plus on avance dans ce projet et plus nous avons envie de travailler avec des instrumentistes traditionnels. Un des principes du label est d’ailleurs que nous ne signons aucun Dj, uniquement des producteurs / performers-artistes live. A terme, notre vocation est de signer d’autres artistes. Des gens qui sont dans cette veine de musique dansante mais qui soit une musique IDM (intelligence dance music) que l’on écoute. Nous voulons arriver à dépasser l’envie hétéronome des gens de danser pour en faire quelque chose de plus classique.

Quel est le rythme de vos events et ceux à venir ?

Nous sommes nés de la culture électronique (EDM : electronic dance music) mais nous voulons arriver à produire autre chose. Une musique à proprement parler, autonome. Mon absolu serait de faire des salles de concert en jouant uniquement des sons rythmiques. C’est une chose qui se fait de plus en plus, même dans les festivals importants qui réunissent les amateurs de fête et de danse. J’ai une référence récente en la matière qui est Pantha du Prince que j’ai vu se produire à la Cigale. A la base, il fait une musique électronique plutot dansante, mais, même si les gens dansaient, c’était un vrai concert. Il y a une vraie effervescence de la fête dance à Paris depuis un moment.
De notre côté, nous nous sommes produits dans des petites salle comme le Mimi’s, le Dandy, le zéro zéro (petite institution de cette culture électronique parisienne), le malibu . La radio Make it deep nous a également proposé de jouer à un de leur évenement avec Joss Moog et de passer sur leur antenne.

Pour l’instant, quel est ton meilleur souvenir avec le label ?

Les lives avec Pohl. Avant, je faisais des lives uniquement avec mon ordinateur, ce qui fait que les gens ne se rendent pas compte de la différence entre un Dj et un live. Quand le public voit le piano, quelque chose de plus musical se passe, auquel les gens sont beaucoup plus sensibles.
En étant auto-entrepreneur, on a la chance d’avoir toutes les libertés artistiques, en terme musical et visuel. Dans le milieu parisien, on arrive à discerner un réseau autour de nous sans qu’il n’y ait aucune concurrence. On est une vraie génération d’artistes, un petit cercle dans lequel nous sommes peu nombreux.

Tu vas sortir ton premier vinyle en tant qu’artiste sous le pseudo Gabor. Que peux-tu nous en dire ?

Ce vinyle, qui sort chez Mesma Records est en effet uniquement le mien. C’est un EP avec un sampling artisanal. Tous les sons que j’ai réunis sont des sons que j’ai fait (pieds de chaises, pots, bout de table). Ce sont des sons que je vais chercher dans mon environnement, que je récolte autour de moi quand je travaille. Home made. Je les considère comme des bouts de sons accidentels. Il y a une base mélodique (en fond) par dessus laquelle je rajoute ces « accidents sonores ». Les textures sont retravaillées pour arriver à une sorte de masse sonore.

Pourquoi avoir fait le choix de ce support ?

Dans le milieu dans lequel on évolue, le vinyle est le seul support à avoir une valeur légitime. Il va donc constituer notre vrai départ en tant que label qui édite de la musique comme support matériel. Il sera le fruit de notre envie de rendre physique ce travail, de concrétiser notre projet avec un objet matériel. Le format vinyle nous permet aussi de rester compatible avec cette culture Dj dont nous sommes très proches.

Propos recueillis par Capucine Michelet

Découvrez l’EP Bibelots en écoute sur soundcloud : https://soundcloud.com/mesmarecords/sets/gabor-bibelots-ep

En vente sur Discogs : http://www.discogs.com/Gabor-Bibelots-EP/release/6109901