Les Studios Ferber, basés dans le vingtième arrondissement de Paris, appartiennent à l’Histoire de la musique. Depuis quarante années, le légendaire studio d’enregistrement accueille les plus grands artistes français et internationaux, de la variété au jazz, en passant par la musique de films. Entretien avec Jean-Christophe Le Guennan, manager.
Comment, dans votre parcours personnel, en êtes-vous venu à la musique ?
Les Studios Ferber furent créés en 1973 par René Ameline, mon oncle. Au début des années quatre-vingt, les Studios ont connu des problèmes, car l’arrivée des synthétiseurs qui remplaçaient les enregistrements live fut très préjudiciable à cette structure basée sur l’acoustique et… l’enregistrement live justement. De ce fait, René a fait appel à moi, afin de développer de nouvelles activités. Travaillant pour ma part comme critique cinématographique, je choisis de relever ce défi en 1987, en redéveloppant l’enregistrement de musiques de films et de publicités. Quelques années plus tard, je mets en place le concept de réalisateur audio « maison », en proposant à Renaud Letang et Jean Lamoot d’avoir leur propre cabine dans nos locaux.
[caption id="attachment_8692" align="aligncenter" width="500"] Le mythique Studio A[/caption]Ces deux ingénieurs réalisateurs sont aujourd’hui des références internationales.
Comment se déroule une journée « type » au studio ?
Il n’y a pas de journée type, car nous avons cinq studios et les séances sont totalement différentes les unes des autres, ce qui évite la monotonie.
De nombreux artistes sont de passage aux Studios Ferber qui sont à l’image d’un « Chelsea Hotel». Chaque jour, vous travaillez avec des grands noms du répertoire de la musique : jazz, classique, variétés française et internationale… Comment faites-vous pour garder les « pieds sur terre » ?
Le fait d’être au service des artistes ne permet en aucun cas de « prendre la grosse tête ». Vous êtes là pour répondre à tous leurs « caprices » ou demandes. Les relations doivent rester professionnelles, même si des relations amicales peuvent en découler. Par ailleurs, il ne faut jamais oublier qu’un studio d’enregistrement n’est que le support technique d’une création artistique.
[caption id="attachment_8693" align="aligncenter" width="500"] Nick Cave aux Studios Ferber[/caption]Tout au long de votre parcours, quel est le musicien qui vous a le plus marqué ? Pouvez-vous nous évoquer un souvenir, une anecdote à ce sujet ?
Le musicien qui m’a le plus marqué est Bireli Lagrène, guitariste de génie avec qui nous avons enregistré quatre albums. Lors d’une séance, il enregistrait un solo, René Ameline lui demande de venir écouter la prise, Bireli se met au fond de la cabine et écoute. À un moment, Bireli fait une moue qui démontre qu’il est lui-même impressionné par son jeu, à la limite de se demander comment il a pu être l’auteur d’une telle performance. René se retourne vers Bireli, qui, timidement, lui dit : « Je crois qu’elle est pas mal ».
Les Studios Ferber, fondés par René Ameline, ont une histoire qui fait partie de l’Histoire de la musique… Pourriez-vous brièvement évoquer la création des Studios Ferber pour les lecteurs de Profondeurs de Champs ?
Les Studios Ferber furent créés en 1973 par René Ameline, qui était à l’époque ingénieur du son aux Studios Davout, mais voulant avoir son propre studio, afin de décider lui-même du traitement et de l’étude acoustique des cabines et salles d’enregistrement. Les locaux étaient ceux d’une usine de fers à repasser ayant brûlé et furent donc dessinés par René Ameline lui-même.
Lou Doillon, «Devil or Angel » en live
Serge Gainsbourg a travaillé aux studios. Pourriez-vous nous parler de la « petite » histoire du « canapé Gainsbourg », à trois places, tout de cuir noir ?
Le « canapé Gainsbourg » fut offert à René Ameline pour son anniversaire en 1979 lors de l’enregistrement de l’album de Jacques Dutronc « Guerre et pets » réalisé par Serge Gainsbourg. Ce canapé mythique nous a quittés l’année dernière, car malheureusement, son état physique ne lui permettait plus de recevoir les visiteurs.
À quels studios mythiques de Londres, New York, ou d’ailleurs, compareriez-vous les Studios Ferber ?
Les Studios Ferber sont uniques, comme Abbey Road, Air Studio, et tant d’autres, uniques par leur spécificité.
[caption id="attachment_8694" align="aligncenter" width="500"] Tournage de « Le Ben et Bertie Show » pour Paris Première. De dos, Bertrand Burgalat face à Chilly Gonzales au piano[/caption]Nous serions heureux et curieux d’avoir votre playlist du moment. Pouvez-vous nous citer quelques titres, quelques noms… Quels sont vos coups de cœur du moment ?
Ma playlist est très variée et diversifiée, car j’essaie d’écouter toutes sortes de musiques, même si j’ai un peu de mal avec le rap français, à l’exception d’Oxmo Puccino. Pour ne pas être très original, mon coup de cœur est Stromae, qui à mes yeux est l’artiste le plus complet et le plus novateur.
Y a-t-il des groupes, des musiciens faisant partie (ou pas) de cette playlist, avec lesquels vous souhaiteriez collaborer ?
Pour être logique dans ma démarche, j’aimerais collaborer avec Stromae. J’aimerais également faire un enregistrement live de James Brown, mais là , je crains que ce ne soit un peu compromis.
Entretien réalisé par Nicolas Grenier