20h57 : Nous arrivons place Saint-Georges, dans le neuvième arrondissement de Paris. Le concert de ce soir se joue quelques rues plus haut, au Carmen, ancien hôtel particulier de Georges Bizet transformé en lieu de perdition raffiné de l’uniforme nuit parisienne. Je crois qu’il eût été plus sage de sortir à la station Pigalle mais je ne peux m’empêcher de céder à l’envie de revoir cette place qu’inexplicablement j’apprécie tant. Chose exceptionnelle, j’ai décidé d’arriver à l’heure indiquée. Et pour cause : le garçon que l’on vient voir ce soir fait le buzz, ce mot si dur à l’oreille et si cher à l’industrie musicale actuelle, triste écho d’une conceptualisation sans âme de notre société.
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Rejeton d’un storytelling tire-larmes rabâché à l’envi – Benjamin Clementine a été repéré alors qu’il n’était qu’un chanteur des rues, écumant quotidiennement la ligne 2 du métro parisien dans lequel il s’était exilé – le jeune et charismatique chanteur anglais n’en est pas pour autant dénué de talent.
Charismatique, ce grand échalas qui, de showcases en showcases affole les tourneurs et les maisons de disques, l’est pour le moins. Ponctuant ses ninasimonesques chansons de regards hallucinés et de discours plus ou moins éclairés (dont il se prend parfois lui-même à rire, notamment quand il lance un « For those who don’t know me, my name is Benjamin Clementine : Welcome to my World » bien trop solennel pour ne pas être ridicule), la mécanique de cet acteur qui joue sa partition à la perfection est bien huilée.
Assénant ses arpèges hypnotiques qu’il recouvre de sa voix forte et incantatoire, le chanteur maîtrise son répertoire fait d’une poignée de compositions (on retiendra le single Cornerstone) et de reprises, notamment le mythique Ain’t Got No… de Nina Simone dont il assume sans embages un héritage pourtant lourd. Le concert est court et millimétré, et si l’on passe un bon moment on ne peut s’empêcher de sentir en filigrane une opération de com’ qui manque légèrement de finesse.
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Paul Grunelius