Il puise dans le « négatif » à la manière de Biolay, est un « insoumis » comme Gainsbourg et nous murmure à l’oreille son premier album Du bout des lèvres. Sur fond de compositions épurées, Le Noiseur pose les mots de la réalité de la vie en toute intimité. Miossec, Daniel Darc et plus récemment Arnaud Fleurent-Didier, autant d’inspirations pour cet auteur-compositeur-interprète qui, de la complexité de l’amour, sait trouver le ton juste.
[caption id="attachment_8484" align="aligncenter" width="500"] Le Noiseur © Vittorio Bettini[/caption]Pourquoi « Le » Noiseur ?
Ça me vient de ma mère qui m’appelait comme ça quand j’étais petit. J’étais un enfant très turbulent donc ça m’allait bien. Aujourd’hui, c’est plus pour souligner mes contradictions. Je suis à la fois timide, pudique et en même temps je vais sur scène chanter mes chansons. C’est toujours un peu une manière de chercher des noises.
Un nom de scène, c’est aussi l’occasion de pouvoir jouer un personnage ?
Au départ ce n’était pas prévu mais il y a un peu de ça maintenant. Je prends de plus en plus de plaisir à être sur scène. Je peux faire des choses que je ne fais pas dans la vie et m’adresser aux gens plus facilement, les faire réagir : être un peu quelqu’un d’autre le temps d’un concert. C’est aussi un spectacle donc il faut être un peu libre, oser faire des choses, être surprenant. C’est ça qui est intéressant à imaginer.
Quelle est votre formation musicale ?
J’ai fais des études de musique où j’ai appris des choses en harmonie, en écriture. Mais sinon, je suis plutôt autodidacte, j’ai vraiment appris par moi-même la musique. Je fais un peu de piano, de la batterie et je compose les chansons. A partir d’un clavier, je me débrouille avec tout ça. Aujourd’hui, on a accès aux sons de tous les instruments et on peut presque faire un disque tout seul chez soi.
Vous avez toujours eu envie de faire ce métier ?
Depuis assez tôt oui, de faire des chansons, de chanter. Ça a été un processus long de franchir le cap, de faire écouter des choses aux gens, d’oser écrire. Tout ça a pris beaucoup de temps. En plus avec la voix, il y a quelque chose d’impudique. La chanson, c’est particulier comme truc ! J’ai des souvenirs assez fort adolescent de me dire que je voudrais vraiment faire ça mais ça a pris des années.
Comment pourriez-vous qualifier le genre de musique que vous faites ?
De la chanson française, ça se range dans cette catégorie. Il y a beaucoup de chansons plus parlées que du « vrai chant » à proprement dit, peut-être une influence rap qui ne se ressent pas au premier abord. Le rap, c’est la musique de mon adolescence, que j’écouterai toute ma vie je pense. C’est une forme terriblement émouvante. Moi j’ai toujours chanté comme ça, c’est aussi dans ma personnalité. Je trouve qu’on se met plus à nu quand on parle que quand on chante. C’est en rythme, il y a de l’intonation dans la voix, des notes. C’est presque du jeu, un peu faire son cinéma. J’ai vraiment le sentiment sur scène de dire plus de moi quand je fais ça que quand je chante. Que c’est encore plus sincère, plus intime. Mais après, il faut des textes qui s’y prêtent. Les textes de mes chansons sont doux, cela aurait été contradictoire de chanter de manière agressive. Ça serait un peu étrange. J’ai eu l’occasion de prendre des cours de chant à La Rochelle, au chantier des Francos. On apprend à trouver sa voix, c’est intéressant mais je pense que pour ma part, ça va rester longtemps comme ça.
On rapproche votre musique de celle de Serge Gainsbourg, Benjamin Biolay…que pensez-vous de cette filiation ?
C’est normal quand on arrive dans ce milieu qu’on en passe forcément par ce stade là . Il y a pas mal de similitudes avec Benjamin Biolay, même dans la manière de chanter. C’est plutôt flatteur mais j’espère qu’on ne s’arrêtera pas à la comparaison. Ça prend du temps de se détacher de ses influences et de faire vraiment quelque chose à soi.
Pourquoi ce désir d’écrire des chansons ?
Je n’avais pas du tout de velléité d’écriture au départ, aucune inspiration littéraire. Je n’étais pas très bon à l’école en rédaction, ça me paniquait même assez d’écrire. Plus tard, ça s’est fait naturellement. C’est parti un peu d’histoires d’amour douloureuses, de la nécessité de dire des choses. A un moment, ça a été une nécessité d’écrire tout ce que je vivais et petit à petit j’ai vraiment pris du plaisir à écrire de plus en plus. Aujourd’hui, dans ce que je fais, c’est le plus intéressant.
Vous commencez par écrire ou par composer la musique ?
Pour ce disque, j’ai plutôt commencé par faire la musique et pour les dernières chansons, j’ai commencé par le texte. Je m’aperçois que c’est peut-être parfois plus difficile mais que le résultat est mieux. Comme je n’ai pas vraiment de bagage technique c’est long, un peu plus douloureux. J’ai plus de facilités avec les mots qu’avec la musique, plus d’armes avec les mots. Donc si je sais ce que je veux dire et que j’ai des idées claires ensuite la musique viendra plus facilement. J’aime raconter des histoires. Quand on arrive à dire ce qu’on avait envie de dire avec le texte, c’est des moments assez forts. Avec l’écriture de mon disque j’ai le sentiment d’avoir dit ce que j’avais à dire, ça fait beaucoup de bien.
Vous aimeriez écrire pour les autres ?
Aujourd’hui, c’est une période compliquée avec la crise du disque. Il faut écrire pour les autres, il faut multiplier les projets, être très actif pour arriver à vivre de ça uniquement. J’ai un petit peu commencé à le faire et c’est quelque chose qui me plaît beaucoup. Et puis il y a ce truc un peu magique quand on écrit un texte, qu’on le donne à quelqu’un et qu’il en fait une chanson. Ensuite on écoute le résultat et on est détaché.
Les textes écrits pour les autres seraient moins personnels de fait ?
En général, tout ça répond aussi à une demande. C’est rare qu’on nous dise « fais ce que tu veux ». On se met aussi dans la peau de la personne pour laquelle on écrit. Cela fait forcément faire des choses différentes de ce qu’on ferait pour soi je pense, mais si on a la chance d’écrire pour des gens inspirants, peu importe. Je me vois plus écrire pour des femmes d’ailleurs.
Dans votre disque, il est surtout question d’amour. Pourquoi ce choix ?- Vous auriez envie d’aborder d’autres thèmes ?
La première fois que je suis monté sur scène, c’était par amour. Par amour, on fait des trucs qu’on ne ferait pas. Il y a deux chansons dans l’album qui sont sur d’autres thèmes. Une qui parle de la mémoire et une sur la mélancolie, c’est sûrement la plus personnelle d’ailleurs. Quand je les ai écrites, j’étais tout seul donc c’est une part de ma personnalité qui s’exprime plus mélancolique, plus torturée. Le ton est globalement assez grave, assez sombre mais j’ai aussi envie d’un peu plus de légèreté. C’est bien d’aller voir d’autres horizons, d’être moins focalisé sur soi. Dans les chansons, il y a aussi de la fiction.
Que pouvez-vous dire sur cet album qui arrivera en janvier prochain ?Â
Je suis très content d’avoir réussi à faire ce disque. Ça a été un long cheminement, quelque chose de très personnel. Il n’y a pas beaucoup de frontières entre celui que j’étais quand j’ai fait le disque et maintenant. J’espère que ça se ressent.
Retrouvez Le Noiseur sur Facebook.
Propos recueillis par Capucine Michelet